Beaudelaire: Difference between revisions
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Et les grands ciels qui font rêver d'éternité. | Et les grands ciels qui font rêver d'éternité. | ||
Il est doux, à travers les brumes, de voir naître | Il est doux, à travers les brumes, de voir naître | ||
L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre, | L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre, | ||
Les fleuves de charbon monter au firmament | Les fleuves de charbon monter au firmament |
Revision as of 14:07, 19 July 2006
Fr240 automne 2006 Paris : L’Épicentre Troisième lecture : Charles Baudelaire, « Tableaux Parisiens » des Fleurs du mal (1861) Lisez attentivement les 30 poèmes sur Paris que Baudelaire avait inclus dans la deuxième édition de la collection Les Fleurs du Mal.
Choisissez un poème qui vous plaît et vous en faites une explication de texte à la française. Lisez le poème au moins deux fois pour vous concentrez sur la rime et le rythme. Vous pouvez consulter des sites tels que www.fleursdumal.org pour voir des traductions en anglais. Il y a aussi des lectures à écouter.
Ensuite, cherchez les sens des mots que vous ne connaissez pas, ou qui vous semble d’une densité sémantique, ensuite trouvez, et puis, les images, les tropes, tels que la métaphore, la métonymie, les oppositions, les juxtapositions. Source du texte électronique : http://poetes.com/baud/Tableaux0.htm#http://poetes.com/baud/Tableaux0.htm# 18 juillet, 2006 Les Fleurs du Mal Au Lecteur Spleen et Idéal Tableaux parisiens Paysage Le Soleil À une Mendiante rousse Le Cygne Les Sept Vieillards Les Petites Vieilles Les Aveugles À une Passante Le Squelette laboureur Le Crépuscule du Soir Le Jeu Danse macabre L'Amour du Mensonge Je n'ai pas oublié... La servante au grand coeur... Brumes et Pluies Rêve parisien Le Crépuscule du Matin Recueillement
Biographie du poète: http://www.biblioweb.org/-BAUDELAIRE-Charles-.html 18 juillet, 2006
Exemple d’un commentaire composé http://www.bibliotheques.qc.ca/HyperNews/get/forums/general/51/1/2/1/3/3/18/4.html 18 juillet, 2006
Le Paysage
Je veux, pour composer chastement mes églogues, Coucher auprès du ciel, comme les astrologues, Et, voisin des clochers, écouter en rêvant Leurs hymnes solennels emportés par le vent. Les deux mains au menton, du haut de ma mansarde, Je verrai l'atelier qui chante et qui bavarde; Les tuyaux, les clochers, ces mâts de la cité, Et les grands ciels qui font rêver d'éternité.
Il est doux, à travers les brumes, de voir naître L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre, Les fleuves de charbon monter au firmament Et la lune verser son pâle enchantement. Je verrai les printemps, les étés, les automnes; Et quand viendra l'hiver aux neiges monotones, Je fermerai partout portières et volets Pour bâtir dans la nuit mes féeriques palais. Alors je rêverai des horizons bleuâtres, Des jardins, des jets d'eau pleurant dans les albâtres, Des baisers, des oiseaux chantant soir et matin, Et tout ce que l'Idylle a de plus enfantin. L'Émeute, tempêtant vainement à ma vitre, Ne fera pas lever mon front de mon pupitre; Car je serai plongé dans cette volupté D'évoquer le Printemps avec ma volonté, De tirer un soleil de mon cœur, et de faire De mes pensers brûlants une tiède atmosphère.
Le Soleil
Le long du vieux faubourg, où pendent aux masures
Les persiennes, abri des secrètes luxures, Quand le soleil cruel frappe à traits redoublés Sur la ville et les champs, sur les toits et les blés, Je vais m'exercer seul à ma fantasque escrime, Flairant dans tous les coins les hasards de la rime, Trébuchant sur les mots comme sur les pavés, Heurtant parfois des vers depuis longtemps rêvés.
Ce père nourricier, ennemi des chloroses, Éveille dans les champs les vers comme les roses; Il fait s'évaporer les soucis vers le ciel, Et remplit les cerveaux et les ruches du miel. C'est lui qui rajeunit les porteurs de béquilles Et les rend gais et doux comme des jeunes filles, Et commande aux moissons de croître et de mûrir Dans le cœur immortel qui toujours veut fleurir!
Quand, ainsi qu'un poëte, il descend vers les villes, Il ennoblit le sort des choses les plus viles, Et s'introduit en roi, sans bruit et sans valets, Dans tous les hôpitaux et dans tous les palais.
À une mendiante rousse
Blanche fille aux cheveux roux,
Dont la robe par ses trous Laisse voir la pauvreté Et la beauté,
Pour moi, poète chétif, Ton jeune corps maladif, Plein de taches de rousseur, A sa douceur.
Tu portes plus galamment Qu'une reine de roman Ses cothurnes de velours Tes sabots lourds.
Au lieu d'un haillon trop court, Qu'un superbe habit de cour Traîne à plis bruyants et longs Sur tes talons ;
En place de bas troués, Que pour les yeux des roués Sur ta jambe un poignard d'or Reluise encor ;
Que des nœuds mal attachés Dévoilent pour nos péchés Tes deux beaux seins, radieux Comme des yeux;
Que pour te déshabiller Tes bras se fassent prier Et chassent à coups mutins Les doigts lutins,
Perles de la plus belle eau, Sonnets de maître Belleau Par tes galants mis aux fers Sans cesse offerts,
Valetaille de rimeurs Te dédiant leurs primeurs Et contemplant ton soulier Sous l'escalier,
Maint page épris du hasard, Maint seigneur et maint Ronsard Épieraient pour le déduit Ton frais réduit !
Tu compterais dans tes lits Plus de baisers que de lis Et rangerais sous tes lois Plus d'un Valois !
-Cependant tu vas gueusant Quelque vieux débris gisant Au seuil de quelque Véfour De carrefour ;
Tu vas lorgnant en dessous Des bijoux de vingt-neuf sous Dont je ne puis, oh ! pardon Te faire don.
Va donc, sans autre ornement, Parfum, perles, diamant, Que ta maigre nudité, O ma beauté!
Le Cygne
A Victor Hugo
I
Andromaque, je pense à vous! Ce petit fleuve,
Pauvre et triste miroir où jadis resplendit L'immense majesté de vos douleurs de veuve, Ce Simoïs menteur qui par vos pleurs grandit,
A fécondé soudain ma mémoire fertile, Comme je traversais le nouveau Carrousel. Le vieux Paris n'est plus (la forme d'une ville Change plus vite, hélas! que le cœur d'un mortel) ;
Je ne vois qu'en esprit tout ce camp de baraques, Ces tas de chapiteaux ébauchés et de fûts, Les herbes, les gros blocs verdis par l'eau des flaques, Et, brillant aux carreaux, le bric-à-brac confus.
Là s'étalait jadis une ménagerie ; Là je vis, un matin, à l'heure où sous les cieux Froids et clairs le Travail s'éveille, où la voirie Pousse un sombre ouragan dans l'air silencieux,
Un cygne qui s'était évadé de sa cage, Et, de ses pieds palmés frottant le pavé sec, Sur le sol raboteux traînait son blanc plumage. Près d'un ruisseau sans eau la bête ouvrant le bec
Baignait nerveusement ses ailes dans la poudre, Et disait, le cœur plein de son beau lac natal: «Eau, quand donc pleuvras-tu? quand tonneras-tu, foudre? Je vois ce malheureux, mythe étrange et fatal,
Vers le ciel quelquefois, comme l'homme d'Ovide, Vers le ciel ironique et cruellement bleu, Sur son cou convulsif tendant sa tête avide, Comme s'il adressait des reproches à Dieu!
II
Paris change! mais rien dans ma mélancolie N'a bougé ! palais neufs, échafaudages, blocs, Vieux faubourgs, tout pour moi devient allégorie, Et mes chers souvenirs sont plus lourds que des rocs.
Aussi devant ce Louvre une image m'opprime : Je pense à mon grand cygne, avec ses gestes fous, Comme les exilés, ridicule et sublime, Et rongé d'un désir sans trêve ! et puis à vous,
Andromaque, des bras d'un grand époux tombée, Vil bétail, sous la main du superbe Pyrrhus, Auprès d'un tombeau vide en extase courbée; Veuve d'Hector, hélas! et femme d'Hélénus!
Je pense à la négresse, amaigrie et phtisique, Piétinant dans la boue, et cherchant, l'œil hagard Les cocotiers absents de la superbe Afrique Derrière la muraille immense du brouillard;
A quiconque a perdu ce qui ne se retrouve Jamais, jamais ! à ceux qui s'abreuvent de pleurs Et tètent la Douleur comme une bonne louve! Aux maigres orphelins séchant comme des fleurs!
Ainsi dans la forêt où mon esprit s'exile Un vieux Souvenir sonne à plein souffle du cor ! Je pense aux matelots oubliés dans une île, Aux captifs, aux vaincus ! ... à bien d'autres encor!
Les Sept Vieillards
A Victor Hugo
Fourmillante cité, pleine de rêves,
Où le spectre en plein jour raccroche le passant! Les mystères partout coulent comme des sèves Dans les canaux étroits du colosse puissant.
Un matin, cependant que dans la triste rue
Les maisons, dont la brume allongeait la hauteur, Simulaient les deux quais d'une rivière accrue, Et que, décor semblable à l'âme de l'acteur,
Un brouillard sale et jaune inondait tout l'espace,
Je suivais, roidissant mes nerfs comme un héros Et discutant avec mon âme déjà lasse, Le faubourg secoué par les lourds tombereaux.
Tout à coup, un vieillard dont les guenilles jaunes
Imitaient la couleur de ce ciel pluvieux, Et dont l'aspect aurait fait pleuvoir les aumônes, Sans la méchanceté qui luisait dans ses yeux,
M'apparut. On eût dit sa prunelle trempée
Dans le fiel; son regard aiguisait les frimas, Et sa barbe à longs poils, roide comme une épée, Se projetait, pareille à celle de Judas.
Il n'était pas voûté, mais cassé, son échine
Faisant avec sa jambe un parfait angle droit, Si bien que son bâton, parachevant sa mine, Lui donnait la tournure et le pas maladroit
D'un quadrupède infirme ou d'un juif à trois pattes.
Dans la neige et la boue il allait s'empêtrant, Comme s'il écrasait des morts sous ses savates, Hostile à l'univers plutôt qu'indifférent.
Son pareil le suivait: barbe, œil, dos, bâton, loques,
Nul trait ne distinguait, du même enfer venu, Ce jumeau centenaire, et ces spectres baroques Marchaient du même pas vers un but inconnu.
A quel complot infâme étais-je donc en butte,
Ou quel méchant hasard ainsi m'humiliait? Car je comptai sept fois, de minute en minute, Ce sinistre vieillard qui se multipliait!
Que celui-là qui rit de mon inquiétude,
Et qui n'est pas saisi d'un frisson fraternel, Songe bien que malgré tant de décrépitude Ces sept monstres hideux avaient l'air éternel!
Aurais-je, sans mourir, contemplé le huitième,
Sosie inexorable, ironique et fatal, Dégoûtant Phénix, fils et père de lui-même? - Mais je tournai le dos au cortège infernal.
Exaspéré comme un ivrogne qui voit double,
Je rentrai, je fermai ma porte, épouvanté, Malade et morfondu, l'esprit fiévreux et trouble, Blessé par le mystère et par l'absurdité!
Vainement ma raison voulait prendre la barre;
La tempête en jouant déroutait ses efforts, Et mon âme dansait, dansait, vieille gabarre Sans mâts, sur une mer monstrueuse et sans bords!
Les Petites Vieilles
A Victor Hugo
I
Dans les plis sinueux des vieilles capitales,
Où tout, même l'horreur, tourne aux enchantements, Je guette, obéissant à mes humeurs fatales Des êtres singuliers, décrépits et charmants.
Ces monstres disloqués furent jadis des femmes,
Éponine ou Laïs! Monstres brisés, bossus Ou tordus, aimons-les! ce sont encor des âmes. Sous des jupons troués et sous de froids tissus
Ils rampent, flagellés par les bises iniques, Frémissant au fracas roulant des omnibus, Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques, Un petit sac brodé de fleurs ou de rébus;
Ils trottent, tout pareils à des marionnettes ; Se traînent, comme font les animaux blessés, Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes Où se pend un Démon sans pitié! Tout cassés
Qu'ils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille, Luisants comme ces trous où l'eau dort dans la nuit; Ils ont les yeux divins de la petite fille Qui s'étonne et qui rit à tout ce qui reluit.
- Avez-vous observé que maints cercueils de vieilles Sont presque aussi petits que celui d'un enfant? La Mort savante met dans ces bières pareilles Un symbole d'un goût bizarre et captivant,
Et lorsque j'entrevois un fantôme débile Traversant de Paris le fourmillant tableau, Il me semble toujours que cet être fragile S'en va tout doucement vers un nouveau berceau ;
A moins que, méditant sur la géométrie, Je ne cherche, à l'aspect de ces membres discords, Combien de fois il faut que l'ouvrier varie La forme de la boîte où l'on met tous ces corps.
- Ces yeux sont des puits faits d'un million de larmes, Des creusets qu'un métal refroidi pailleta... Ces yeux mystérieux ont d'invincibles charmes Pour celui que l'austère Infortune allaita !
II
De Frascati défunt Vestale enamourée; Prêtresse de Thalie, hélas! dont le souffleur Enterré sait le nom; célèbre évaporée Que Tivoli jadis ombragea dans sa fleur,
Toutes m'enivrent; mais parmi ces êtres frêles Il en est qui, faisant de la douleur un miel, Ont dit au Dévouement qui leur prêtait ses ailes: Hippogriffe puissant, mène-moi jusqu'au ciel!
L'une par sa patrie au malheur exercée, L'autre, que son époux surchargea de douleurs, L'autre, par son enfant Madone transpercée, Toutes auraient pu faire un fleuve avec leurs pleurs!
III
Ah! que j'en ai suivi de ces petites vieilles ! Une, entre autres, à l'heure où le soleil tombant Ensanglante le ciel de blessures vermeilles, Pensive, s'asseyait à l'écart sur un banc,
Pour entendre un de ces concerts, riches de cuivre, Dont les soldats parfois inondent nos jardins, Et qui, dans ces soirs d'or où l'on se sent revivre, Versent quelque héroïsme au cœur des citadins.
Celle-là, droite encor, fière et sentant la règle, Humait avidement ce chant vif et guerrier; Son œil parfois s'ouvrait comme l'œil d'un vieil aigle; Son front de marbre avait l'air fait pour le laurier!
IV
Telles vous cheminez, stoïques et sans plaintes, A travers le chaos des vivantes cités, Mères au cœur saignant, courtisanes ou saintes, Dont autrefois les noms par tous étaient cités.
Vous qui fûtes la grâce ou qui fûtes la gloire, Nul ne vous reconnaît ! un ivrogne incivil Vous insulte en passant d'un amour dérisoire ; Sur vos talons gambade un enfant lâche et vil.
Honteuses d'exister, ombres ratatinées, Peureuses, le dos bas, vous côtoyez les murs ; Et nul ne vous salue, étranges destinées! Débris d'humanité pour l'éternité mûrs!
Mais moi, moi qui de loin tendrement vous surveille, L'œil inquiet, fixé sur vos pas incertains, Tout comme si j'étais votre père, ô merveille! Je goûte à votre insu des plaisirs clandestins :
Je vois s'épanouir vos passions novices; Sombres ou lumineux, je vis vos jours perdus ; Mon cœur multiplié jouit de tous vos vices! Mon âme resplendit de toutes vos vertus !
Ruines ! ma famille! ô cerveaux congénères! Je vous fais chaque soir un solennel adieu! Où serez-vous demain, Èves octogénaires, Sur qui pèse la griffe effroyable de Dieu ?
Les Aveugles
Contemple-les, mon âme; ils sont vraiment affreux!
Pareils aux mannequins; vaguement ridicules; Terribles, singuliers comme les somnambules; Dardant on ne sait où leurs globes ténébreux.
Leurs yeux, d'où la divine étincelle est partie,
Comme s'ils regardaient au loin, restent levés Au ciel; on ne les voit jamais vers les pavés Pencher rêveusement leur tête appesantie.
Ils traversent ainsi le noir illimité.
Ce frère du silence éternel. O cité! Pendant qu'autour de nous tu chantes, ris et beugles,
Éprise du plaisir jusqu'à l'atrocité,
Vois! je me traîne aussi! mais, plus qu'eux hébété, Je dis: Que cherchent-ils au Ciel, tous ces aveugles?
A une passante
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse, Une femme passa, d'une main fastueuse Soulevant, balançant le feston et l'ourlet;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant, Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan, La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair... puis la nuit! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître, Ne te verrai-je plus que dans l'éternité?
Ailleurs, bien loin d'ici! trop tard! jamais peut-être!
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais, O toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais!
I
Dans les planches d'anatomie
Qui traînent sur ces quais poudreux Où maint livre cadavéreux Dort comme une antique momie,
Dessins auxquels la gravité Et le savoir d'un vieil artiste, Bien que le sujet en soit triste, Ont communiqué la Beauté,
On voit, ce qui rend plus complètes Ces mystérieuses horreurs, Bêchant comme des laboureurs, Des Écorchés et des Squelettes.
II
De ce terrain que vous fouillez, Manants résignés et funèbres, De tout l'effort de vos vertèbres, Ou de vos muscles dépouillés,
Dites, quelle moisson étrange, Forçats arrachés au charnier, Tirez-vous, et de quel fermier Avez-vous à remplir la grange ?
Voulez-vous (d'un destin trop dur Épouvantable et clair emblème!) Montrer que dans la fosse même Le sommeil promis n'est pas sûr;
Qu'envers nous le Néant est traître ; Que tout, même la Mort, nous ment, Et que sempiternellement, Hélas ! il nous faudra peut-être
Dans quelque pays inconnu Écorcher la terre revêche Et pousser une lourde bêche Sous notre pied sanglant et nu?
Le Crépuscule du soir
Voici le soir charmant, ami du criminel;
Il vient comme un complice, à pas de loup: le ciel Se ferme lentement comme une grande alcôve, Et l'homme impatient se change en bête fauve. O soir, aimable soir, désiré par celui Dont les bras, sans mentir, peuvent dire: Aujourd'hui Nous avons travaillé! - C'est le soir qui soulage Les esprits que dévore une douleur sauvage, Le savant obstiné dont le front s'alourdit, Et l'ouvrier courbé qui regagne son lit. Cependant des démons malsains dans l'atmosphère S'éveillent lourdement, comme des gens d'affaire, Et cognent en volant les volets et l'auvent. A travers les lueurs que tourmente le vent La Prostitution s'allume dans les rues; Comme une fourmilière elle ouvre ses issues; Partout elle se fraye un occulte chemin, Ainsi que l'ennemi qui tente un coup de main; Elle remue au sein de la cité de fange Comme un ver qui dérobe à l'Homme ce qu'il mange. On entend çà et là les cuisines siffler, Les théâtres glapir, les orchestres ronfler; Les tables d'hôte, dont le jeu fait les délices, S'emplissent de catins et d'escrocs, leurs complices, Et les voleurs, qui n'ont ni trêve ni merci, Vont bientôt commencer leur travail, eux aussi, Et forcer doucement les portes et les caisses Pour vivre quelques jours et vêtir leurs maîtresses.
Recueille-toi, mon âme, en ce grave moment,
Et ferme ton oreille à ce rugissement. C'est l'heure où les douleurs des malades s'aigrissent! La sombre Nuit les prend à la gorge; ils finissent Leur destinée et vont vers leur gouffre commun; L'hôpital se remplit de leurs soupirs. - Plus d'un Ne viendra plus chercher la soupe parfumée, Au coin du feu, le soir, auprès d'une âme aimée.
Encore la plupart n'ont-ils jamais connu La douceur du foyer et n'ont jamais vécu!
L’Amour du mensonge
Quand je te vois passer, ô ma chère indolente,
Au chant des instruments qui se brise au plafond Suspendant ton allure harmonieuse et lente, Et promenant l'ennui de ton regard profond ;
Quand je contemple, aux feux du gaz qui le colore, Ton front pâle, embelli par un morbide attrait, Où les torches du soir allument une aurore, Et tes yeux attirants comme ceux d'un portrait,
Je me dis : Qu'elle est belle! et bizarrement fraîche! Le souvenir massif, royale et lourde tour, La couronne, et son cœur, meurtri comme une pêche, Est mûr, comme son corps, pour le savant amour.
Es-tu le fruit d'automne aux saveurs souveraines ? Es-tu vase funèbre attendant quelques pleurs, Parfum qui fait rêver aux oasis lointaines, Oreiller caressant, ou corbeille de fleurs ?
Je sais qu'il est des yeux, des plus mélancoliques, Qui ne recèlent point de secrets précieux ; Beaux écrins sans joyaux, médaillons sans reliques, Plus vides, plus profonds que vous-mêmes, ô Cieux!
Mais ne suffit-il pas que tu sois l'apparence, Pour réjouir un cœur qui fuit la vérité? Qu'importe ta bêtise ou ton indifférence? Masque ou décor, salut! J'adore ta beauté.
Je n’ai pas oublié, voisine de la ville,
Je n'ai pas oublié, voisine de la ville,
Notre blanche maison, petite mais tranquille; Sa Pomone de plâtre et sa vieille Vénus Dans un bosquet chétif cachant leurs membres nus, Et le soleil, le soir, ruisselant et superbe, Qui, derrière la vitre où se brisait sa gerbe, Semblait, grand œil ouvert dans le ciel curieux, Contempler nos dîners longs et silencieux, Répandant largement ses beaux reflets de cierge Sur la nappe frugale et les rideaux de serge.
La Servante au grand cœur…
La servante au grand cœur dont vous étiez jalouse,
Et qui dort son sommeil sous une humble pelouse, Nous devrions pourtant lui porter quelques fleurs. Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs, Et quand Octobre souffle, émondeur des vieux arbres, Son vent mélancolique à l'entour de leurs marbres, Certe, ils doivent trouver les vivants bien ingrats, A dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps, Tandis que, dévorés de noires songeries, Sans compagnon de lit, sans bonnes causeries, Vieux squelettes gelés travaillés par le ver, Ils sentent s'égoutter les neiges de l'hiver Et le siècle couler, sans qu'amis ni famille Remplacent les lambeaux qui pendent à leur grille.
Lorsque la bûche siffle et chante, si le soir, Calme, dans le fauteuil je la voyais s'asseoir, Si, par une nuit bleue et froide de décembre, Je la trouvais tapie en un coin de ma chambre, Grave, et venant du fond de son lit éternel Couver l'enfant grandi de son œil maternel, Que pourrais-je répondre à cette âme pieuse, Voyant tomber des pleurs de sa paupière creuse ?
Brumes et Pluies
O fins d'automne, hivers, printemps trempés de boue,
Endormeuses saisons! je vous aime et vous loue D'envelopper ainsi mon cœur et mon cerveau D'un linceul vaporeux et d'un vague tombeau.
Dans cette grande plaine où l'autan froid se joue, Où par les longues nuits la girouette s'enroue, Mon âme mieux qu'au temps du tiède renouveau Ouvrira largement ses ailes de corbeau.
Rien n'est plus doux au cœur plein de choses funèbres, Et sur qui dès longtemps descendent les frimas, O blafardes saisons, reines de nos climats,
Que l'aspect permanent de vos pâles ténèbres, -Si ce n'est, par un soir sans lune, deux à deux, D'endormir la douleur sur un lit hasardeux.
Rêve parisien
A CONSTANTIN GUYS
De ce terrible paysage,
Tel que jamais mortel n'en vit, Ce matin encore l'image, Vague et lointaine, me ravit.
Le sommeil est plein de miracles ! Par un caprice singulier, J'avais banni de ces spectacles Le végétal irrégulier,
Et, peintre fier de mon génie, Je savourais dans mon tableau L'enivrante monotonie Du métal, du marbre et de l'eau.
Babel d'escaliers et d'arcades, C'était un palais infini, Plein de bassins et de cascades Tombant dans l'or mat ou bruni;
Et des cataractes pesantes, Comme des rideaux de cristal, Se suspendaient, éblouissantes, A des murailles de métal.
Non d'arbres, mais de colonnades Les étangs dormants s'entouraient, Où de gigantesques naïades, Comme des femmes, se miraient.
Des nappes d'eau s'épanchaient, bleues, Entre des quais roses et verts, Pendant des millions de lieues, Vers les confins de l'univers ;
C'étaient des pierres inouïes Et des flots magiques ; c'étaient D'immenses glaces éblouies Par tout ce qu'elles reflétaient!
Insouciants et taciturnes, Des Ganges, dans le firmament, Versaient le trésor de leurs urnes Dans des gouffres de diamant.
Architecte de mes féeries, Je faisais, à ma volonté, Sous un tunnel de pierreries Passer un océan dompté ;
Et tout, même la couleur noire, Semblait fourbi, clair, irisé ; Le liquide enchâssait sa gloire Dans le rayon cristallisé.
Nul astre d'ailleurs, nuls vestiges De soleil, même au bas du ciel, Pour illuminer ces prodiges, Qui brillaient d'un feu personnel!
Et sur ces mouvantes merveilles Planait (terrible nouveauté! Tout pour l'œil, rien pour les oreilles!) Un silence d'éternité.
II
En rouvrant mes yeux pleins de flamme J'ai vu l'horreur de mon taudis, Et senti, rentrant dans mon âme, La pointe des soucis maudits;
La pendule aux accents funèbres Sonnait brutalement midi, Et le ciel versait des ténèbres Sur le triste monde engourdi.
Le Crépuscule du matin
La diane chantait dans les cours des casernes,
Et le vent du matin soufflait sur les lanternes.
C'était l'heure où l'essaim des rêves malfaisants Tord sur leurs oreillers les bruns adolescents ; Où, comme un œil sanglant qui palpite et qui bouge, La lampe sur le jour fut une tache rouge ; Où l'âme, sous le poids du corps revêche et lourd, Imite les combats de la lampe et du jour. Comme un visage en pleurs que les brises essuient, L'air est plein du frisson des choses qui s'enfuient, Et l'homme est las d'écrire et la femme d'aimer.
Les maisons çà et là commençaient à fumer. Les femmes de plaisir, la paupière livide, Bouche ouverte, dormaient de leur sommeil stupide; Les pauvresses, traînant leurs seins maigres et froids, Soufflaient sur leurs tisons et soufflaient sus leurs doigts. C'était l'heure où parmi le froid et la lésine S'aggravent les douleurs des femmes en gésine ; Comme un sanglot coupé par un sang écumeux Le chant du coq au loin déchirait l'air brumeux ; Une mer de brouillards baignait les édifices, Et les agonisants dans le fond des hospices Poussaient leur dernier râle en hoquets inégaux. Les débauchés rentraient, brisés par leurs travaux.
L'aurore grelottante en robe rose et verte S'avançait lentement sur la Seine déserte, Et le sombre Paris, en se frottant les yeux, Empoignait ses outils, vieillard laborieux.
Recueillement
Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir; il descend; le voici: Une atmosphère obscure enveloppe la ville, Aux uns portant la paix, aux autres le souci.
Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci, Va cueillir des remords dans la fête servile, Ma Douleur, donne-moi la main; viens par ici,
Loin d'eux. Vois se pencher les défuntes Années,
Sur les balcons du ciel, en robes surannées; Surgir du fond des eaux le Regret souriant;
Le Soleil moribond s'endormir sous une arche,
Et, comme un long linceul traînant à l'Orient, Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.
Danse Macabre
À ERNEST CHRISTOPHE
Fière, autant qu'un vivant, de sa noble stature,
Avec son gros bouquet, son mouchoir et ses gants, Elle a la nonchalance et la désinvolture D'une coquette maigre aux airs extravagants.
Vit-on jamais au bal une taille plus mince? Sa robe exagérée, en sa royale ampleur, S'écroule abondamment sur un pied sec que pince Un soulier pomponné, joli comme une fleur.
La ruche qui se joue au bord des clavicules, Comme un ruisseau lascif qui se frotte au rocher, Défend pudiquement des lazzi ridicules Les funèbres appas qu'elle tient à cacher.
Ses yeux profonds sont faits de vide et de ténèbres, Et son crâne, de fleurs artistement coiffé, Oscille mollement sur ses frêles vertèbres. O charme d'un néant follement attifé .
Aucuns t'appelleront une caricature, Qui ne comprennent pas, amants ivres de chair, L'élégance sans nom de l'humaine armature. Tu réponds, grand squelette, à mon goût le plus cher!
Viens-tu troubler, avec ta puissante grimace, La fête de la Vie ? ou quelque vieux désir, Éperonnant encor ta vivante carcasse, Te pousse-t-il, crédule, au sabbat du Plaisir?
Au chant des violons, aux flammes des bougies, Espères-tu chasser ton cauchemar moqueur, Et viens-tu demander au torrent des orgies De rafraîchir l'enfer allumé dans ton cœur ?
Inépuisable puits de sottise et de fautes ! De l'antique douleur éternel alambic ! A travers le treillis recourbé de tes côtes Je vois, errant encor, l'insatiable aspic.
Pour dire vrai, je crains que ta coquetterie Ne trouve pas un prix digne de ses efforts ; Qui, de ces cœurs mortels, entend la raillerie ? Les charmes de l'horreur n'enivrent que les forts !
Le gouffre de tes yeux, plein d'horribles pensées, Exhale le vertige, et les danseurs prudents Ne contempleront pas sans d'amères nausées Le sourire éternel de tes trente-deux dents.
Pourtant, qui n'a serré dans ses bras un squelette, Et qui ne s'est nourri des choses du tombeau ? Qu'importe le parfum, l'habit ou la toilette? Qui fait le dégoûté montre qu'il se croit beau.
Bayadère sans nez, irrésistible gouge, Dis donc à ces danseurs qui font les offusqués : «Fiers mignons, malgré l'art des poudres et du rouge, Vous sentez tous la mort! O squelettes musqués,
Antinoüs flétris, dandys à face glabre, Cadavres vernissés, lovelaces chenus, Le branle universel de la danse macabre Vous entraîne en des lieux qui ne sont pas connus!
Des quais froids de la Seine aux bords brûlants du Gange, Le troupeau mortel saute et se pâme, sans voir Dans un trou du plafond la trompette de l'Ange Sinistrement béante ainsi qu'un tromblon noir.
En tout climat, sous tout soleil, la Mort t'admire En tes contorsions, risible Humanité, Et souvent, comme toi, se parfumant de myrrhe, Mêle son ironie à ton insanité ! »
Le Jeu
Dans des fauteuils fanés des courtisanes vieilles,
Pâles, le sourcil peint, l'œil câlin et fatal, Minaudant, et faisant de leurs maigres oreilles Tomber un cliquetis de pierre et de métal;
Autour des verts tapis des visages sans lèvre, Des lèvres sans couleur, des mâchoires sans dent, Et des doigts convulsés d'une infernale fièvre, Fouillant la poche vide ou le sein palpitant ;
Sous de sales plafonds un rang de pâles lustres Et d'énormes quinquets projetant leurs lueurs Sur des fronts ténébreux de poètes illustres Qui viennent gaspiller leurs sanglantes sueurs ;
Voilà le noir tableau qu'en un rêve nocturne Je vis se dérouler sous mon œil clairvoyant. Moi-même, dans un coin de l'antre taciturne, Je me vis accoudé, froid, muet, enviant,
Enviant de ces gens la passion tenace, De ces vieilles putains la funèbre gaieté, Et tous gaillardement trafiquant à ma face, L'un de son vieil honneur, l'autre de sa beauté!
Et mon cœur s'effraya d'envier maint pauvre homme Courant avec ferveur à l'abîme béant, Et qui, soûl de son sang, préférerait en somme La douleur à la mort et l'enfer au néant!
Exemple d’un commentaire composé proposé par les bibliothèques du Québec : http://www.bibliotheques.qc.ca/HyperNews/get/forums/general/51/1/2/1/3/3/18/4.html
Charles Baudelaire : A une passante
Introduction : Ce sonnet appartient aux tableaux parisiens du recueil Les fleurs du mal, il est donc lié à l'inspiration de la vie. L'univers urbain offre à Baudelaire des sujets de description, de narration, de réflexion. Mais le poète ne reste pas extérieur au spectacle de la rue. Il y participe à la recherche de rencontres décisives en quête de symboles qui font de ces spectacles et de ces rencontres les reflets d'un monde complexe, celui de la condition humaine, celui de sa propre vie. En ce sens, chaque rencontre est importante. Le sonnet est construit sur un thème romanesque, celui de la rencontre. Mais il est traité dans une tonalité typiquement baudelairienne. On trouve l'éblouissement de l'attirance féminine, la recherche d'une nouvelle espérance pleinement heureuse et l'échec d'une relation qui laisse le poète désemparé.
Texte :
La rue assourdissante autour de moi hurlait. Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse, Une femme passa, d'une main fastueuse Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ; Agile et noble, avec sa jambe de statue. Moi, je buvais, crispé comme un extravagant, Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan, La douceur qui fascine et le plaisir qui tue. Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté Dont le regard m'a fait soudainement renaître, Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être ! Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais, Ô toi que j'eusse aimée, à toi qui le savais !
Annonce des axes
I - La rencontre
A. Dans un contexte sonore.
Le vacarme de la rue moderne est exprimé :
Personnification de la rue ("la Rue ... hurlait"). La distance entre les deux mots "rue" et "hurlait", trou de plus comblé par l'adjectif "assourdissant". Les deux fictions entre 2 voyelles (rue/assourdissante/autour) Le tout est provocateur de vacarme. Ce vacarme montre que la communication verbale est impossible : donc la communication va passer par le regard.
B. Une rencontre exceptionnelle.
Cette rencontre exceptionnelle est marquée par l'insistance du poète à souligner l'allure de cette passante par le rythme ample de la phrase qui s'étend sur quatre vers et qui contient son portrait en mouvement.
vers 2 : délimite les "parties du corps" de la passante, précède la régularité des vers 3 et 4. vers 4 : Quatre groupes de trois syllabes qui expriment le rythme et l'harmonie de la passante (rythme ternaire). vers 5 : enjambement sur le deuxième quatrain pour élargir le portrait en apportant des éléments d'ordre moral. La jonction de la beauté morale et de la grâce du corps aboutissent à une idéalisation de la beauté soulignée par l'expression "avec sa jambe de statue" qui exprime toute la majesté et la noblesse de la passante.
Soulignons aussi l'expression "en grand deuil" dans le premier quatrain. Baudelaire rapproche la notion de beauté et de tristesse.
Transition : Un rapprochement assez étrange mais qui prend tout son sens quand on voit par les suites les réactions émotionnelles du poète.
II - Les réactions du poète
A. Un auteur fasciné mais mal à l'aise.
vers 6 : le narrateur est un spectateur "paralysé", "fasciné". Son attitude est soulignée par le terme "crispé". La comparaison "comme un extravagant" montre l'opposition des attitudes entre "lui" et "elle" et explique la réaction émotionnelle incontrôlée de l'auteur face à cette passante.
vers 8 : Le verbe "boire" dénote l'avidité qui s'oppose donc avec le participe passé "crispé". La paralysie du poète est à la fois ardente et timide.
B. Un coup de foudre.
vers 7 : sensibilité du regard de la femme souligné par les qualitatifs caractéristiques d'un ciel orageux : "livide", "bleu gris".
> On retrouve les deux composantes de l'amour baudelairien. "douceur" "fasciné" "plaisir qui tue" donnent une impression de sentiments agréables, de glissement.
Transition : Une réaction paradoxale donc quand à cette rencontre qui amène la réflexion du poète sur ces évènements.
III - Les réflexions du poète
Passage du vouvoiement au tutoiement : le poète s'adresse directement à la femme.
vers 9 : Résume la rencontre: "un éclair" puis "la nuit" : un renversement donc. vers 11 : La rencontre appartient au passé et la femme ne sera l'objet de contemplation que dans un futur mystique. vers 10 : Forme interrogative qui appelle une réponse donc un espoir. vers 12 : Triple exclamation qui scande les étapes de la dégradation de tout espoir. vers 13 : Construction en chiasme : je/tu tu/je : souligne qu'il existe une apparente similitude du destin (chacun fait en ignorance de cause) ce qu'il ne fait que les éloigner davantage l'un de l'autre. vers 14 : Appel voué à ne pas être entendu. C'est un paradoxe : le conditionnel passé rejète tout accomplissement dans l'irréel mais le verbe "aimer" exprime une certitude, celle de l'amour. Le deuxième hémistiche concentre tout le mystère de la rencontre et toute l'amertume du poète. Baudelaire a exprimé ici le drame de l'incompréhension entre l'homme et la femme (la passante s'est-elle retournée par indifférence-pudeur-fierté-cruauté?) avec cette ambiguïté.
Conclusion : Accumulation de détails qui inscrivent le récit dans un contexte social et moral. On devine un personnage qui vit mal la médiocrité de la vie et qui saura utiliser ses qualités physiques pour changer son existence. On perçoit déjà que son avenir sera prometteur.