"Rimbaud l'enragé" au Théâtre Sorano - Mars 2007

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Rimbaud l’Enragé - Une saison en enfer

Théâtre Sorano

Représentation du 7 mars 2007


Le poète : Arthur RIMBAUD (1854-1891)


Génie précoce, Rimbaud vint à Paris à l’âge de 17 ans avec l’idée que la poésie nassait d’une «alchimie du verbe» et des sens. Il eut une liaison amoureuse avec le poète Paul Verlaine qui se termina par une scène violente : blessé d’un coup de revolver, Rimbaud composa alors les poèmes en prose d’Une Saison en enfer ou il exprimait ses délires. A 20 ans, il cessa quasiment toute activité d’écrivain. Il devint soldat puis déserteur et voyaga à Chypre, à Java, et en Afrique. Il mourut à l’hôpital à Marseille au moment où sa poésie commençait à être reconnu comme l’aboutissement de recherches romantiques et baudelairiennes.

Nourrie de récolte, auréolée de légende, revendiquée par le surréalisme, l’oeuvre de Rimbaud a profondément influencé la poésie moderne.


L’œuvre Une saison en enfer


Comme Rimbaud lui-même l'écrivait à la fin de son manuscrit, Une Saison en enfer a été rédigé entre les mois d'avril et août 1873, c'est-à-dire après deux épisodes particulièrement douloureux dans la vie du poète : l'exil londonien et, surtout, la fameuse dispute où Verlaine blessa Rimbaud d'un coup de feu.

Après un "Prélude" où le poète annonce qu'il a failli devenir fou, qu'il a failli mourir aussi, Rimbaud retrace l'itinéraire qui l'a presque mené à sa perte. D'abord, dans "Mauvais sang", il remonte jusqu'à ses ancêtres gaulois pour expliquer qu'il est issu d'une race esclave et que, né d'ancêtres qui ont couru les Sabbats et traversé l'Europe pour rejoindre les Croisades, l'ordre social lui a toujours été étranger. Dans "Nuit de l'enfer", d'abord intitulé "Fausse conversion", Rimbaud regrette ne pas avoir assumé la part païenne de son héritage et d'avoir au contraire succombé au mysticisme chrétien. D'autres errements sont contés dans "Délires". C'est à cette époque que le poète s'habitua à l'hallucination simple, qu'il trouva sacré le désordre de son esprit, bref qu'il exploita tous les sophismes de la folie - la folie qu'on enferme. Cette section d'Une Saison en enfer semble retracer l'expérience de la voyance.

Les quatre chapitres qui suivent présentent le retour progressif à la raison, cheminement tout de même interrompu par quelques mirages et quelques désespoirs. Dans "L'Impossible", Rimbaud évoque tour à tour l'Orient et la science. Dans "L'Éclair", tout rêve, tout mysticisme apparaissent vains, alors qu'avec "Matin" l'expression de l'espoir prend le dessus. Enfin, Rimbaud explique avec "L'Adieu" qu'il ne lui reste plus qu'à s'astreindre au travail: lui qui s'est dit mage ou ange, dispensé de toute morale, il est rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre !

Rimbaud a assumé lui-même la publication d'Une Saison en enfer, probablement en septembre 1873. L'œuvre a été imprimée à Bruxelles à 500 exemplaires. Ce n'est qu'en 1901 qu'un bibliophile belge découvrit les brochures qui n'avaient jamais été mises en vente. Cependant, il fallut attendre 1914 pour que la confession de l'enfer que nous a laissée Rimbaud devienne enfin accessible.


Rimbaud l’Enragé - Une saison en enfer

Mise en scène de Didier Carette au Théâtre Sorano


Pour plus d'informations, voir le site officiel du Théâtre Sorano


Rimbaud on the rock (article de Sylvie Roux paru dans La Dépêche du Midi le 13 mai 2006)

Comment incarner un génie à mutliples facettes comme Rimbaud ? Dans son juvénile et très rock’n rollien « Rimbaud l’Enragé, » Didier Carette contourne le problème en dédoublant le poète. Sur la scène du Sorano jonchée de feuilles froissées un jeune homme sensuel, trouble, rebelle, fait face au public, campé devant son micro. Sa silhouette évoque la belle gueule romantique de Arthur [Rimbaud]. Il chuchote : « Si je m’en souvient bien ma vie était un festin. » Un ange passe. Petit cornes rouges, ailes blanches dans le dos, peau ruisselante de paillettes. Une autre Rimbaud, triste et exubérant comme un travesti, qui soupire et halète. Ce petit bijou de spectacle, intimiste et musical, nous embarque dans l’univers exalté du poète, entre fulgurances poétiques et descentes vertigineuses, rage de vivre et douce léthargie. Les textes d’Une Saison en enfer sont éclairés par des lettres poignantes de la sœur et de la mère de Rimbaud. Les aires de piano et de violoncelle accompagne avec délicatesse des poèmes qui font de belles chansons, comme l’irradiant « Qu’il vienne le temps dont on s’éprenne où Rimbaud et son double ne font plus qu’un.


Rage et poèsie (article de Marlène Goetz paru dans L'Opinion Indépendante le 19 mai 2006)

…Didier Carette a choisi deux acteurs pour incarner les dilemmes du poète. Le premier ressemble en tous points à l’image que l’on a gardée de Rimbaud : un jeune homme à la silhouette romantique, engoncé dans sa veste trop étroite. Le comédien emporte l’adhésion par sa subtilité et sa conviction. Son alter ego vient compléter le personnage en offrant d’autres facettes : sa féminité, son exubérance, sa bouffonnerie. Mi-ange, mi-démon, il interprète un double dynamique et extrême, constamment entre rire et larme. En se consacrant à la fois à sa tendre innocence – qui n’est pas de la naïveté, mais plutôt de la pureté – et à sa folie tour à tour sarcastique et autodestructrice, les deux acteurs s’opposent puis se confondent. Au cœur de l’œuvre il y a bien sûr les poèmes de Rimbaud que le metteur en scène a choisi parmi Une saison en enfer. Si Rimbaud l’Enragé possède une véritable originalité, c’est aussi grâce aux personnages secondaires et à la musique. En effet, la mère et la sœur du poète font partie intégrante de la pièce. Leurs textes sont tirés de leur correspondance, l’interprétation est fine et émouvante. Quant à la musique, elle est omniprésente. Un piano et un violoncelle ajoute une touche de poésie supplémentaire et accompagne les comédiens lorsqu’ils se mettent à chanter leurs vers. On dit que Rimbaud « lisait ses vers sans emphase et sans éclat de voix. » Ici, ils sont chuchotés et hurlés. La rage du poète est indémodable.